jeudi 23 janvier 2014

-> LA LAIDEUR SE VEND MAL, Raymond Loewy

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Ce titre, c’est celui d’un livre de Raymond Loewy, célèbre designer français, obligé de s’expatrier aux États-Unis en 1919 pour que son métier soit enfin reconnu et valorisé. Bien sûr, on imagine immédiatement son contraire : “Le joli se vend mieux”. Dans ce simple titre, c’est toute une partie de la mission du design qui s’exprime. Quand il s’agit d’identité, on parle aisément d’esthétisme. Mais dans le design graphique dédié aux packagings de grande consommation, c’est loin d’être une évidence.

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Le design est une discipline qui relève à la fois de la fonction et de l’esthétique. Dans le design industriel, on va chercher à créer une chaise sur laquelle il sera confortable de s’asseoir durablement par sa forme, sa matière, son ergonomie… et dont l’esthétique procurera un plaisir visuel par son “dessin”, sa ligne, son aspect, sa couleur, sa qualité de finition. Ainsi le design d’un véhicule pourra servir à la fois le volume de son habitacle, son aérodynamisme… Mais aussi une esthétique racée, puissante ou ludique. Si la chaise est jolie mais très inconfortable, ce n’est pas un bon design. Si la voiture est splendide mais si lourde et si peu aérodynamique que sa consommation fait fondre votre carte bancaire, ce n’est pas du bon design non plus.

C’est la même chose pour le design graphique

Hebergeur d'image Pourtant, les briefs packagings que les clients transmettent à leurs agences parlent plus d’efficacité, d’impact en linéaire, de lisibilité, de visibilité, de traduction de promesse… que d’un objectif esthétique ou d’une préoccupation sur le caractère « joli » du produit final.
Raymond Loewy écrivait sur ses cartes de visite : « entre deux produits de même prix et de même qualité, celui qui a la plus belle apparence se vendra le mieux ». Alors pourquoi ne pas s’y intéresser dès le départ ?

Se poser la question

D’ailleurs… Combien d’études se préoccupent de savoir, auprès des consommateurs, si le packaging est plus beau qu’avant ? De manière générale, lorsqu’une marque lance une étude de marché sur un nouveau packaging, les questions posées sont orientées, comme les briefs, sur des aspects techniques. Impact, différenciation par rapport aux concurrents ou encore crédibilité du produit étant les maîtres mots d’une étude « parfaite ». Pourtant, ces aspects techniques ne sont qu’une partie de l’acte d’achat, la part rationnelle.

Malheureusement, la part émotionnelle est très rarement approchée, ou alors très mal. Par exemple, la question « aimez-vous ce produit » se résume la plupart du temps à l’indication d’une note de 0 à 10, selon qu’on aime le produit un peu, beaucoup, ou pas du tout. Il peut aussi arriver qu’une étude demande à quoi les consommateurs prêtent le plus attention lors de l’achat d’un produit particulier. Mais la question n’arrivera qu’en toute fin de formulaire. Et la proposition « l’esthétisme » arrivera, elle, presque en dernière position. Bref, tel un détail insignifiant, secondaire. Pourtant, c’est bien l’émotion générée par la beauté d’un objet qui amènera les consommateurs à acheter cet objet plutôt qu’un autre. La question mériterait donc d’être posée.

Vive les exceptions !

Pour certains, l’intérêt porté à l’esthétisme tient une place prépondérante. Notamment en fin d’année lorsque de nombreux packagings se parent d’habits de fête. Mais aussi lors de la création de packagings collector ou voués à être diffusés via un canal de distribution particulier, le sélectif. Colette, La Grande Épicerie de Paris… des magasins (concept store pour certains) qui suscitent l’attention avec des produits en édition limitée ou exclusivement créés pour eux.

Un intérêt partagé également par les secteurs de l’alcool et de la cosmétique, finalement assez proches dans leur démarche. Avec une bouteille de champagne ou un flacon de parfum, ce que l’on cherche avant tout, c’est un bel objet. Un bel objet à offrir à quelqu’un ou à soi-même, pour se faire plaisir. Un bel objet qui valorise autant la personne qui l’achète, que celle qui le reçoit. Sortir un très beau rouge à lèvres de son sac à main sera valorisant, autant que de poser une belle bouteille sur la table de ses invités.

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Au delà de l’esthétique visuelle, la dimension multi-sensorielle est très importante dans ces univers. Une attention particulière est donc apportée à la forme et la matière de ces produits. En cosmétique, l’attention portée à un packaging « joli » est, forcément, intimement liée à la fonction finale du produit. Difficile d’imaginer un produit de « beauté » dans un packaging « laid ». Mais ces packagings ont également une fonction décorative… de votre salle de bains. Pour un produit à offrir ou très impliquant à l’achat, le beau est évident. Pourquoi, par exemple, une boîte de petits pois pourrait prendre le risque d'être laide ? Parce qu'elle n'est ni offerte, ni impliquante ?

Ils ont osé

Avoir un « joli » packaging n’est finalement pas une évidence pour les marques de grande consommation. Elles le veulent efficace techniquement et souvent, elles y arrivent. Mais obnubilées par l’approche rationnelle, elles en oublient l’impérative émotion qui fait passer à l’achat. Danone a osé. En lançant une campagne affirmée mettant en avant la beauté de ses nouveaux packagings, la marque prouve que même un pot de yaourt peut être beau.

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Expresso

Même si Raymond Loewy a beaucoup travaillé dans le design industriel, sa contribution à l’univers des produits de grande consommation fut également décisive (le premier logotype de marque LU ou le paquet de Lucky Strike par exemple). Mais c’est le titre de son livre, « La laideur se vend mal » que nous devons retenir aujourd’hui. Dans un monde de plus en plus rationnel et rationalisant, le consommateur est bien plus émotionnel qu’il n’y paraît. « Efficacité » n’est donc pas à opposer à « esthétisme ». Tout comme « design » s’accorde avec « business ».


source : Catherine Pipers / @LaPauseDesign
+ d'info : http://fr.wikipedia.org/wiki/Raymond_Loewy
Livre dispo sur Amazone


vendredi 10 janvier 2014

-> VITESSE EN SLOW MOTION

Aprés les fêtes, il est de coutume de retrouver les campagnes de communications institutionnelle, on commencera l'année avec celle de cette campagne de prévention routière qui fait froid dans le dos: ici pas de choc immédiat, pas de sang, juste le futur mort et un chauffard qui conversent.



L’agence NZ Transport Agency, chargée de promouvoir la sécurité sur les routes de Nouvelle-Zélande, créée l’événement et met en lumière la manière dont les individus perçoivent leur vitesse. Beaucoup s’imagine que rouler à 100-110 km/h, c’est acceptable. Ils pensent rouler confortablement et avoir le total contrôle de leur véhicule. Or, le problème n’est pas là, un « bon conducteur » peut aussi faire des erreurs. Et une erreur sur la route, ça ne pardonne pas, même la plus petite faute peut coûter la vie. L’opération rappelle ainsi un phénomène simple mais souvent oublié : plus la vitesse est importante, moins le conducteur a le temps de réagir et d’éviter l’accident. Sur ce constat, l’association a ainsi réalisé avec Clemenger BBDO un spot TV marquant mettant en scène deux conducteurs sur une route. Au moment où les deux sont sur le point de se percuter, le temps se suspend et les deux hommes discutent : l’un suppliant le second de ralentir pour ne pas mettre en danger son fils. L’arrêt du temps à la manière d’un film de science-fiction, la pression ressentie par la voiture continuant d’avancer petit à petit, se rapprochant de l’échéance funeste, créent la surprise. 

Un rappel fort : sur la route nous ne sommes pas seuls, « Les autres font des erreurs – ralentissez». Une vidéo bien pensée qui n’utilise pas immédiatement la violence pour marquer les esprits, et terriblement efficace puisqu’elle comptabilise déjà plus de 2,7 millions de vues sur YouTube en l’espace de 5 jours.